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Les chats dans la poésie française
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Auteur :  laetitia [ 14/05/2008 17:01 ]
Sujet du message :  Les chats dans la poésie française

Le chat Beaudelaire Les Fleurs du Mal

Viens, mon beau chat, sur mon coeur amoureux;
Retiens les griffes de ta patte,
Et laisse-moi plonger dans tes beaux yeux,
Mêlés de métal et d'agate.

Lorsque mes doigts caressent à loisir
Ta tête et ton dos élastique,
Et que ma main s'énivre du plaisir
De palper ton corps électrique,

Je vois ma femme en esprit. Son regard,
Comme le tien, aimable bête,
profond et froid, coupe et fend comme un dard,

Et, des pieds jusques la tête,
Un air subtil, un dangereux parfum,
Nage autour de son corps brun.

Auteur :  Guillaume de Baskerville [ 02/06/2008 19:25 ]
Sujet du message : 

Chapristi que c'est beau !

Auteur :  Walhalla [ 02/06/2008 21:58 ]
Sujet du message : 

Un peu que c'est beau !
Ce recueil de Baudelaire est une pure merveille de poésie... Un véritable ravissement, un des rares "classique" qui trouve grâce à mes yeux...

Que du bonheur... :grin:

Auteur :  Nicole [ 03/06/2008 04:30 ]
Sujet du message : 

Il m'est revenu d'un coup en mémoire...merci Laetitia... :cool:

Auteur :  laetitia [ 19/06/2008 09:53 ]
Sujet du message :  Les chats (Les fleurs du mal de Beaudelaire)

Les chats

Les amoureux fervents et les savants austères
Aiment également, dans leur mûre saison,
Les chats puissants et doux, orgueil de la maison,
Qui comme eux sont frileux et comme eux sédentaires.

Amis de la science et de la volupté,
Ils cherchent le silence et l'horreur des ténèbres;
L'Erèbe les eût pris pour ses courriers funèbres,
S'ils pouvaient au servage incliner leur fierté.

Ils prennent en songeant les nobles attitudes
De grands sphinx allongés au fond des solitudes,
Qui semblent s'endormir dans un rêve sans fin;

Leurs reins féconds sont pleins d'étincelles magiques,
Et des parcelles d'or, ainsi qu'un sable fin,
Etoilent vaguement leurs prunelles mystiques.

Beaudelaire

(de rien Nicole :wink: !)

Auteur :  Didili [ 19/06/2008 17:00 ]
Sujet du message : 

Il y a aussi celle là :

Le Chat Qui ne Ressemble à rien

Le chat qui ne ressemble à rien
Aujourd'hui ne va pas très bien.

Il va visiter le Docteur
Qui lui ausculte le coeur.

Votre coeur ne va pas bien
Il ne ressemble à rien,

Il n'a pas son pareil
De Paris à Créteil.

Il va visiter sa demoiselle
Qui lui regarde la cervelle.

Votre cervelle ne va pas bien
Elle ne ressemble à rien,

Elle n'a pas son contraire
A la surface de la terre.

Voilà pourquoi le chat qui ne ressemble à rien
Est triste aujourd'hui et ne va pas bien.

Robert Desnos

Auteur :  Didili [ 19/06/2008 17:03 ]
Sujet du message : 

et puis celle de Jacques Prévert :love:

Le chat et l'oiseau

Un village écoute désolé
Le chant d'un oiseau blessé
C'est le seul oiseau du village
Et c'est le seul chat du village
Qui l'a à moitié dévoré
Et l'oiseau cesse de chanter
Le chat cesse de ronronner
Et de se lécher le museau
Et le village fait à l'oiseau
De merveilleuses funérailles
Et le chat qui est invité
Marche derrière le petit cercueil de paille
Où l'oiseau mort est allongé
Porté par une petite fille
Qui n'arrête pas de pleurer
Si j'avais su que cela te fasse tant de peine
Lui dit le chat
Je l'aurais mangé tout entier
Et puis je t'aurais raconté
Que je l'avais vu s'envoler
S'envoler jusqu'au bout du monde
Là-bas c'est tellement loin
Que jamais on n'en revient
Tu aurais eu moins de chagrin
Simplement de la tristesse et des regrets

Il ne faut jamais faire les choses à moitié

Jacques Prévert

Auteur :  laetitia [ 19/06/2008 17:05 ]
Sujet du message : 

Merci de me rappeler ce magnifique poème! Il est triste mais beau. Le texte de Prévert est très émouvant.

Auteur :  Didili [ 19/06/2008 17:13 ]
Sujet du message : 

De rien :wink: j'ai pour ma part profité de ton post que tu as créé sur les chats et la poésie :mrgreen: :wink:

Auteur :  laetitia [ 19/06/2008 17:19 ]
Sujet du message : 

Vive les amoureux des chats ils peuvent ainsi refaire découvrir de superbes textes :wink:

Auteur :  auryn [ 19/06/2008 20:20 ]
Sujet du message : 

Oulà ! Vieux souvenir là que le poème de Robert Desnos. Je me souviens l'avoir appris en primaire. :grin:
Merci Didili pour ce bond de vingt ans en arrière. :marteau: :wink:

Auteur :  laetitia [ 24/06/2008 13:35 ]
Sujet du message : 

Le Chat d'Apollinaire tiré du Bestiaire

Je souhaite dans ma maison:
Une femme ayant sa raison,
Un chat passant parmi les livres,
Des amis en toute saison
Sans lequels je ne peux pas vivre.

Auteur :  laetitia [ 28/06/2008 16:44 ]
Sujet du message : 

Claudine et Cléo de Nicole Provence

Dans les foins chauds et odorants de l’été, Cléo se glisse, furtive, ondulante,allongeant avec précaution ses pattes de velours striées, et les pose avec la légèreté d’un vol de libellule.

L’air est immobile, comme en attente d’un événement qui déchirera pour un instant, le silence.

La chatte s’est arrêtée instantanément, le regard fixe, ses yeux verts bordés de khôl comme ceux d’une odalisque. Les moustaches tremblent et les oreilles pivotent.

Elle est là, elle guette, devançant le grattement timide de la souris désireuse de s’étourdir du soleil qui brûle l'air.
Bientôt, quelques granules de terre glissent dans le trou. Un petit museau renifle l’air, hésite, recule et sort à nouveau, mis en confiance par le silence qui l’entoure. Il ignore encore le regard d’hypnotiseur qui la guette.

Cléo bande ses muscles, s’astreint une immobilité parfaite.

La souris s’est avancée, confiante hors de son trou, et c’est au moment où elle pressent le danger qu’une patte la plaque violemment au sol. Des griffes d’acier dans une gaine de fourrure la retiennent prisonnière et l’empêchent de fuir. La mignonne a instinctivement compris, viscéralement elle sait…Inutile de se débattre, les barreaux de cette cage de poils sont solides. Si elle persiste à tenter de s’évader, ils se refermeront cruellement sur elle. Alors, elle fait la morte pour tromper son ennemie, sachant qu’un seul mouvement exciterait l’instinct de la chasseresse. Elle devient molle. L’inertie feinte intrigue et déconcerte la chatte. Qu’est ce donc cette chose qui ne bouge plus ?

Ce petit paquet aux poils ras et gris ne semble plus vivant.

Incrédule, la chatte observe. La patte de velours fait une pichenette du petit corps au ras de l’herbe, espérant la ranimer.

La chatte est déçue, elle la pousse encore du bout de ses griffes pour la stimuler puis la prend dans sa gueule, sans la croquer encore, elle a le temps ! Sa prise entre les dents, la chatte ondule et se dirige fièrement vers les petites roches blanches qui dessinent une rocaille.

Cléo la laisse choir à terre et s’en désintéresse…

Dame souris sent son coeur qui se calme, elle reprend ses esprits…

Dame chatte semble davantage préoccupée par la tige du saule pleureur dansant dans l’air tiède que par l’humble souriceau qui espère toujours.

La voilà qui tente de fuir, la pauvrette, en aveugle, humant désespérément l’air qui la guidera jusqu’à son trou…

Alors, Cléo a bondi, heureuse que son jouet s’anime à nouveau. Elle s’ennuyait déjà ! Elle la saisit de ses griffes encore innocentes et la projette dans l’air comme une balle, encore et encore Souricette tourbillonne, vole et rebondit. Elle a le vertige, Cléo s’amuse au chat et à la souris, un jeu qu’on ne lui a pas appris petite mais qui est inscrit dans la mémoire ancestrale de tous les chats. Parce qu’elle a un peu trop serré cette petite chose tiède et palpitante, presque par inadvertance, une goutte de sang a perlé sur sa langue, réveillant son instinct de carnassier. Pour avoir le jus de ce fruit étrange, elle sait qu’il faut le presser davantage, et sans hésiter, elle referme ses dents aiguës sur le petit campagnol.

Cléo se régale. Dieu que la souris était bonne et goûteuse ! Elle dédaigne une patte arrière et la queue qui ressemble à un ver d terre desséché. Une aubaine pour les fourmis qui la détectent et se précipitent en colonne organisée.

La chatte s’essuie proprement la gueule. Elle passe et repasse sa patte humide sur son museau, lisse ses moustaches puis s’arrête une seconde. Elle baille sans façon en étirant ses yeux. Le soleil la caresse. Elle continue à se lécher consciencieusement, puis s’étire voluptueusement, les pattes loin en avant, son petit derrière en l’air et la queue tendue. On se croirait à la prière de la Mecque. Cléo s’incline et se prosterne jusqu’à terre pour la remercier de la provende qui vient de garnir son estomac. C’était peu en fait, une si petite souris ! Elle sent son appétit aiguisé et cherche autour d’elle ce qui ferait un entremet ou un dessert convenable.

L’herbe est verte et tendre, elle s’y vautre comme une fainéante et jouit avec ivresse de sa liberté, allonge son corps et le tend comme un arc, bascule et roule sur elle-même, griffant l’air et le ciel. Elle baille encore et ses moustaches se rejoignent en un arc en cercle délicat audessus de son museau pointu, découvrant ses dents acérées et sa langue rose.

Nicole Provence (Extraits)

Pour lire le texte et découvrir le site de Nicole Provence
:arrow: http://www.nicoleprovence.com/index.php

Auteur :  Nicole [ 28/06/2008 17:32 ]
Sujet du message : 

Merci chère Laetitia. :bisou: Je prends pour un véritable hommage le fait que tu offres la lecture d' un extrait de Claudine et Cléo en le jugeant digne de figurer auprès des textes, combien délicieux, des poètes qui ont enchanté mon enfance, et j'en suis très touchée. :oops: :grin:

Auteur :  laetitia [ 28/06/2008 18:34 ]
Sujet du message : 

Votre texte sur Cléo est superbe. Il me donne une impression de lire un texte de Colette! Il a donc sa place dans cette rubrique! :grin:

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